Créateurs

PIERRE CHAREAU (1883-1950)

PIERRE CHAREAU

 4 août 1883 (Bordeaux) –  24 août 1950 (East-Hampton)

BIOGRAPHIE

Architecte – décorateur, créateur de mobilier et de luminaires.

Pierre Paul Constant Chareau est né le 3 août 1883 à Bordeaux. Il est le deuxième des trois enfants de Georges-Adolphe-Benjamin Chareau et d’Esther Isabelle Carvalho, des négociants, installés à Paris depuis 1891. Sensible à l’art sous toutes ses formes, le jeune Pierre Chareau s’intéresse à la fois à la peinture et à la musique, mais hésite entre plusieurs voies. Il choisit finalement de devenir architecte et tente d’entrer, sans succès, aux Beaux-Arts. Il se tourne alors vers à la création de mobilier et décide de se confronter à la pratique. Il entre, vers 1901, comme calqueur dans les bureaux parisiens de la firme britannique Waring & Gillow, spécialisée dans les meubles de style. Il évolue au sein de cette maison et devient dessinateur en chef jusqu’à son départ en avril 1914.

Dans les mêmes années, il rencontre sa femme, Louise Dorothee Dyte (1880-1967), une britannique, surnommée Dollie, professeur d’anglais, avec laquelle il se marie en 1904. Par les contacts qu’elle noue avec ses élèves, un groupe d’amis se forme autour des Chareau qui, peu à peu dans le climat de confiance qui s’instaure, va fonder le cercle originel des commanditaires privés au premier rang desquels figure la famille Bernheim : Émile et sa fille Madeleine, Raymond, Paul et sa femme Hélène, Edmond et sa fille Annie.

Parallèlement, Pierre Chareau travaille le soir pour son propre compte. Il étudie la décoration et l’architecture et présente, dès 1907, des perspectives intérieures dans le style de la renaissance anglaise, dans la section architecture du Salon de la Société des Artistes Français. En 1908, il réalise l’aménagement de l’appartement de Madeleine Bernheim. Élève de Dollie, elle vient d‘épouser le dramaturge Edmond Fleg. En 1920, lors de la transformation de l’appartement en duplex, Chareau reprendra entièrement cet aménagement.

L’arrivée de la première guerre mondiale contraint Pierre Chareau à cesser son activité. Il est mobilisé dans l’artillerie en 1914 et c’est seulement en 1919, à l’âge de 35 ans, qu’il ouvre son propre atelier de création de mobilier, 54, rue Nollet, à Paris. Dollie devient son assistante.

Edmond Bernheim demande à Chareau d’intervenir dans la résidence secondaire de la famille, à Villeflix (Noisy-le-Grand). Sa collaboration avec Jean Lurçat, l’un des amis de Jean Dalsace, débute : pour recouvrir certains des meubles qu’il a dessinés, Lurçat réalise des cartons de tapisseries exécutées au petit point par son épouse Marthe Hennebert.

L’un de ses premiers chantiers est l’appartement d’Annie Bernheim, élève de Dollie depuis 1905 ; elle vient d’épouser le Docteur Jean Dalsace. Pierre Chareau y réalise l’aménagement du cabinet de travail du médecin, l’entrée de l’appartement et la chambre à coucher de cet appartement situé au 195, boulevard Saint Germain à Paris.

Pierre Chareau tisse des liens d’amitiés solides avec certains de ses clients : à la naissance du premier enfant du couple Dalsace, Chareau réalise la chambre de l’enfant, comme il le fera plus tard chez Hélène Bernheim, pour laquelle il réalisera une nursery.

Néanmoins, la clientèle de Chareau ne se borne pas aux seules relations des Bernheim et il se voit confier la conception de plusieurs intérieurs dont entre autres ceux de la photographe Thérèse Bonney (1928), Lise Deharme, Roger Gompel, Octave Homberg, Marcel et Henry Kapferer, Madame Reifenberg (1927), ou M. Simon, etc.

En 1924, il ouvre un magasin dirigé par Dollie ; La Boutique, située 3, rue du Cherche-Midi à Paris. A la manière d’une galerie d’art, elle lui permet de mieux faire connaître ses créations et celles de ses amis, à un plus large public. Curieux d’expérimenter de nouveaux domaines d’expression, il participe à la réalisation des décors des films d’avant-garde du réalisateur Marcel L’Herbier. Il collabore avec Rob. Mallet-Stevens et Fernand Léger pour les films L’Inhumaine (1925), Le Vertige (1926) et L’Argent (1928).

Jeanne Bucher, que Jean Lurçat avait présenté aux Bernheim et à Chareau, se lie d’amitié avec Dollie. Jeanne Bucher organise dans la Boutique des expositions d’art jusqu’à l’ouverture de sa propre galerie au 5 rue du Cherche Midi en 1929. Pendant la Seconde Guerre mondiale, cette dernière veillera sur des ateliers ou des maisons que d’autres artistes tels Pierre Chareau, Jacques Lipchitz ou Maria Elena Vieira Da Silva et Arpad Szenes devront quitter ; elle y installera ses jeunes artistes, Nicolas de Staël chez Chareau, Louis Déchelette chez Lipchitz, et Henri Goetz et Christine Boumeester chez Vieira da Silva.

L’organisation de l’Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes en 1925 à Paris lui donne l’occasion de participer à un projet collectif aux côtés des défenseurs de la modernité. Il se voit confier une part importante de la réalisation de l’Ambassade Française présentée par le Pavillon de la Société des Artistes Décorateurs, où il conçoit un étonnant bureau-bibliothèque et une salle de repos. Il réalise là l’un des exemples les plus frappants de son travail sur la mobilité, et propose un bureau-bibliothèque de forme circulaire surmonté d’une coupole. La lumière rayonne ainsi dans la pièce mais peut aussi être dissimulée par un plafond mobile en bois de palmier qui s’escamote entièrement en reprenant les principes de l’éventail. Cette même année il réalise pour Hélène Bernheim, épouse de Paul Bernheim, cousin d’Annie, le Salon de Coromandel.

Sensible à la qualité des réalisations de Pierre Chareau, l’architecte Rob. Mallet-Stevens lui propose de collaborer à la réalisation du décor et du mobilier de la villa qu’il construit pour le Vicomte Charles de Noailles à Hyères, l’une des réalisations les plus avant-gardistes de l’époque.

Pierre Chareau reçoit sa première commande en tant qu’architecte en 1925, lorsque Émile Bernheim, lui demande de concevoir le Club-House du Golf Hôtel de Beauvallon dans le Var. Ainsi commence sa collaboration avec l’architecte néerlandais Bernard Bijvoet. En 1927, pour Edmond Bernheim, il débute le projet de la construction de la Villa Vent d’Aval sur le même domaine.

Parallèlement, Paul Bernheim, cousin d’Annie Dalsace, lui confie l’aménagement de l’ensemble des salles de réception du Grand Hôtel de Tours. Il s’agit pour Pierre Chareau d’un programme nouveau, tant par l’ampleur des lieux à aménager que par le nombre de pièces mobilières à livrer. C’est aussi l’un des tous premiers chantiers d’hôtel confiés à un architecte moderne. Rue Mallet-Stevens il réalise l’aménagement de l’appartement de M et Mme Reifenberg.

En 1927, le Docteur Jean Dalsace, lui commande le projet de la Maison de Verre, 31, rue Saint Guillaume à Paris (1928-1932), qui sera son œuvre majeure. Il travaille sur ce projet en collaboration avec Bernard Bijvoet et le Maître ferronnier Louis Dalbet rencontré au Salon des Artistes Décorateurs de 1922. Cette réalisation fut un tour de force où Pierre Chareau réussit à construire trois étages lumineux, dans le rez-de-chaussée et le premier étage d’un petit hôtel obscur, contraint par la présence d’une vieille dame ne souhaitant pas quitter son appartement du deuxième étage.

Lors du Salon d’Automne de 1929, il présente « en tant qu’invité » de L’Union des Artistes Modernes, mouvement fraichement fondé, du mobilier conçu pour le journal La Semaine à Paris, 28 rue d’Assas. En 1930, il prend part avec les « dissidents » du Salon des Arts Décoratifs à la première exposition de l’UAM, au Pavillon de Marsan. Il devient un membre actif du mouvement en 1931.

En 1930-1932, Daniel Dreyfus, pour qui Chareau avait aménagé en 1923-1924 un studio, confie à nouveau à l’architecte la décoration et l’organisation intérieure d’un grand appartement, situé 9 rue Le-Tasse à Paris. Il réalise l’appartement de M. et Mme Maurice Fahri, 2 bis avenue Raphaël.

Entre 1931 et 1938, Chareau poursuit ses recherches sur la mobilité dans le meuble; de 1931 à 1932, il exécute des bureaux en dalles de verre et en cuivre, pour la société de Lignes Télégraphiques et Téléphoniques, 89, rue de la Faisanderie à Paris.

En 1937, la danseuse Marie Le Blond, plus connue sous le nom de Djémil Anik, qui faisait partie du cercle des amis de la rue Nollet, lui commande l’édification d’une maison de campagne sur une propriété située à Bazainville. Cette fois il est amené à résoudre de nombreux problèmes posés par l’alimentation en eau, par l’éclairage et par le chauffage. Chareau trouve une solution à ces difficultés en utilisant des parois pliantes pour laisser l’air chaud circuler et permettre une transformation de la salle de séjour. Cette idée annonçait en réalité le concept de pièce-maison qu’il devait développer ultérieurement à New York.

Cette même année, membre du Comité d’Organisation de l’Exposition Internationale, il aménage le centre d’accueil du Pavillon de l’UAM, confié à Georges-Henri Pingusson, Frantz-Philippe Jourdain et André Louis.

Pierre Chareau se voit confier à partir de 1938 plusieurs commandes publiques. Il exécute un bureau pour Monsieur Marx, ministre plénipotentiaire au Ministère des Affaires Étrangères et participe, aux côtés de Francis Jourdain et Louis Sognot, à l’aménagement des bureaux du Collège de France. La même année, il réalise, revenant à un matériau qu’il utilisa à ses débuts, un cosy-corner en osier pour l’appartement de Madame Marcelle Minet. Son dernier projet en France, pendant la guerre, fut le Foyer du Soldat Colonial au Grand Palais, pour lequel il conçut un ensemble de mobilier utilitaire.

En septembre 1939, la France entre en guerre, Pierre Chareau tente en vain de partir pour Londres. Il quitte la France en 1940, transite par le Maroc, à Casablanca, où il obtient les papiers nécessaires pour se rendre à New York, accompagné d’Ève Daniel, la fille de Jeanne Bucher. Il s’installe dans l’appartement d’André et Sybille Cournand et devient membre de l’Association France Forever en 1941. L’objectif de France Forever était, par le biais de l’art et de la culture, de donner à voir une autre image du pays et de défendre l’idée que la France reste une démocratie. Il s’agissait de travailler l’opinion publique américaine en faveur d’une intervention militaire des États-Unis en Europe. Dans ce cadre, il organise avec Dollie, qui vient d’arriver en 1942, l’exposition de La France Combattante à la Freedom House, suivent divers aménagements dont celui de La Marseillaise, la cantine de la France Libre.

En 1946, il est nommé conseiller artistique à l’Ambassade de France à New York par le conseiller culturel d’alors, Claude Lévi-Strauss. Il y organise des expositions et conférences.

C’est en 1947, qu’il renoue avec l’architecture lorsque le peintre Robert Motherwell lui passe commande d’une maison à East Hampton, qu’il souhaite voir réaliser avec des éléments en tôle provenant de surplus de l’armée. La difficulté de cette construction réside cette fois dans le peu d’éléments à sa disposition : de grandes vitres provenant d’une vieille serre et des tôles de l’armée. Il réalise toutefois deux étages comprenant plusieurs chambres et cabinets de toilette.

En 1950, sa dernière réalisation est également son ultime tentative de renouer avec un exercice professionnel dans son exil américain. « La Colline« , qu’il doit réaménager pour Mesdames Germaine Monteux et Nancy Laughlin, l’une pianiste, l’autre écrivain. Ce projet présente des difficultés d’un autre ordre, puisqu’il s’agit de tirer parti d’un intérieur déjà existant et aux dimensions réduites. Le résultat sembla si parfaitement convenir aux deux commanditaires, qu’elles décidèrent de délaisser leur habitation principale pour ne vivre que dans celle de Pierre Chareau.

Cette même année, d’après une lettre de Francis Jourdain à George Besson, Pierre Chareau tente de revenir en France pour ainsi mettre un terme à son exil.

Il s’éteint sans avoir pu le faire, le 21 août 1950 à New-York. Il est inhumé au cimetière Saint-Philomenas à East Hampton.

ŒUVRES DISPONIBLES
Pierre Chareau - Bibliothèque Modèle MU 1030, vers 1930
Pierre Chareau - Coiffeuse Modèle MS 1009 et son tabouret Modèle SN 1, vers 1926
Pierre Chareau - Salon Modèle MF F15, vers 1920-1922
Pierre Chareau - Salon Modèle MF F15, vers 1920-1922
Pierre Chareau - Salon Modèle MF F15, vers 1920-1922
Pierre Chareau - Etagère suspendue, Modèle PD 698, vers 1927
Pierre Chareau - Table gigogne Modèle MB 106, vers 1923
Pierre Chareau - Lampe à poser Modèle LP 625, vers 1926
Pierre Chareau - Applique Modèle LA 164, vers 1923
Pierre Chareau - Lampe de table, modèle dit Petite religieuse, vers 1923
Pierre Chareau - Table basse Modèle MB 345, vers 1927
Pierre Chareau - Tabouret de bar Modèle MT 1004, vers 1930
Pierre Chareau - Table-bibliothèque basse, vers 1923
Pierre Chareau - Paire d’appliques d’angle Modèle LA 292 dit «Religieuse», vers 1921
Attribué à Pierre Chareau - Bibliothèque, vers 1930
Pierre Chareau - Paire d’appliques d’angle Modèle LA 292 dit «Religieuse», vers 1921
Pierre Chareau - Paire de fauteuils Modèle MF15, vers 1920-1922
Pierre Chareau - Nécessaire à feu, vers 1926
Pierre Chareau - Fauteuils Modèle MF 208/217, vers 1924
Pierre Charerau - Paire d’appliques Modèle LA 548, vers 1927
Pierre Chareau - Table de jeu et quatre sièges Modèle MF275, vers 1927
Pierre Chareau - Table de jeu et quatre sièges Modèle MF275, vers 1927
Pierre Chareau - Table de jeu et quatre sièges Modèle MF275, vers 1927
Pierre Chareau - Jardinière Modèle PF 35, vers 1923
Pierre Chareau - Applique Modèle LA 551, vers 1923
Pierre Chareau - Table Modèle MB170, vers 1923
Pierre Chareau - Table basse, Modèle MB 110, vers 1923
Pierre Charerau - Paire d’appliques Modèle LA 548, vers 1927
Pierre Chareau - Réceptacle, vers 1922
Pierre Chareau - Étagère d’angle, vers 1922
Pierre Chareau - Miroir, vers 1922
Pierre Chareau - Meuble d’applique, vers 1927
Pierre Chareau - Paire de fauteuils Modèle MF11, vers 1922
Pierre Chareau - Fauteuil Modèle MF732, vers 1924
Pierre Chareau - Meuble d’applique suspendu MA788, vers 1927
Pierre Chareau - Canapé MP169, vers 1923
Pierre Chareau - Fauteuil Modèle MF 208-217, vers 1925